Une société immobilière exploite les lacunes de la loi pour échapper à ses obligations fiscales

Une société immobilière à Sidi Bibi entre respect de la loi et évasion fiscale : Légal en apparence, mais controversé dans le fond

Alors que les collectivités territoriales au Maroc s’efforcent de renforcer leurs ressources financières pour assurer la continuité de leurs services et développer leurs infrastructures, le problème du respect des obligations fiscales par les grandes entreprises se pose avec acuité, notamment en ce qui concerne les taxes sur les terrains urbains non bâtis. La dernière manifestation de ce débat a émergé au sein de la commune de Sidi Bibi, dans la province de Chtouka-Aït Baha, où un litige juridique discret mais significatif a opposé l’autorité locale à une société immobilière

Un conflit administratif sur fond de taxes prescrites

Les faits de l’affaire tournent autour des demandes de la commune de Sidi Bibi pour le paiement des taxes sur les terrains urbains non bâtis pour les années 2022 à 2025, concernant quatre parcelles ayant obtenu des permis de construire depuis 2011. La société, pour sa part, refuse de payer certaines de ces taxes, arguant que certaines sont prescrites en vertu de la loi et qu’elle a droit à une exonération pour les années suivant l’achèvement des travaux en 2023

Entre les échanges de correspondances officielles et la position du gouverneur de la province qui a demandé l’avis de la commune sur une demande d’exonération soumise par la société, les contours d’un dossier qui incarne une problématique plus profonde se dessinent : la relation complexe entre la loi, les pratiques de contournement subtiles et les défis du recouvrement

Lecture de la position de la société : Respect de la loi ou exploitation des lacunes

En déconstruisant le discours de la société, on constate qu’il est construit sur une base juridique solide. Son recours à l’article 123 du Code de recouvrement, qui fixe la prescription des taxes à quatre ans, est juridiquement correct. De même, sa référence aux instructions du ministère de l’Intérieur qui exonèrent le contribuable de la taxe sur les terrains urbains non bâtis à partir de l’année suivant la date d’achèvement des travaux, semble s’appuyer sur une référence administrative reconnue

Cependant, ce “respect strict de la loi” n’est pas dénué d’un pragmatisme évident, et pourrait même être considéré comme une forme d’évasion fiscale légalisée. La société n’a pas pris l’initiative de régulariser sa situation fiscale pendant plus de dix ans, et n’a agi qu’après avoir été officiellement contactée, pour ensuite répondre par des arguments juridiques qui l’exonèrent de l’obligation de payer pour le passé. C’est là que réside l’essence du problème

L’élément de la constatation : question de l’objectif, pas du moyen

La société insiste sur le fait que le certificat de l’architecte remplace la constatation, conformément à l’article 55 de la loi 12.90 relative à l’urbanisme. Bien que cette interprétation soit juridiquement correcte, la question ne se limite pas aux textes, mais à l’esprit de la loi. L’objectif du certificat est-il simplement de compléter les formalités, ou de garantir que les travaux sont réellement terminés ? Et s’ils ont été achevés en 2023, pourquoi les permis d’habiter ou le certificat de conformité n’ont-ils pas été demandés?

Ces lacunes affaiblissent la crédibilité morale de la position de la société, même si elle reste juridiquement défendable en apparence

Leçons à tirer : qui tire profit du retard

Le dossier révèle une lacune chronique dans la gestion fiscale locale : le manque de suivi de la part des collectivités territoriales, et le fait que certains acteurs économiques profitent de ce laxisme pour s’adonner à une évasion fiscale subtile. Et lorsque l’administration se décide à agir, la réponse est prête : “Les taxes sont prescrites, ou les travaux sont terminés, ou les documents remplacent la constatation

Mais qui est responsable ? La commune qui a tardé ? La société qui n’a pas pris l’initiative ? Ou la loi qui permet ce genre d’interprétations ouvertes

Appel à une responsabilité fiscale participative

En conclusion, la société, comme de nombreux acteurs économiques, pratique ce que l’on pourrait appeler une “ruse juridique légitime”. Cependant, le développement local et l’instauration de la confiance entre l’État et l’investisseur ne se réalisent pas seulement en contournant les textes, mais dans un esprit d’engagement et de responsabilité fiscale.

Si nous exigeons des communes une bonne gestion et de la transparence, nous attendons en retour des grandes entreprises qu’elles ne se contentent pas de se conformer aux textes, mais qu’elles contribuent également aux budgets des communes qui accueillent leurs projets et supportent les charges des infrastructures qui y sont liées.

L’équation juste est la suivante : investissement contre engagement, et droits contre devoirs.

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